
Correspondances d’écrivains et chroniques pandémiques baigne dans un abondant paratexte. Le titre du texte, l’épigraphe, la dédicace, les remerciements ou bien encore la préface et l’introduction forment autant de pièces d’une transition qui préparent patiemment le lecteur à la dérision et à la déréliction qui l’accueillent dans le corps du texte en deux parties.
La première partie s’intitule, « Lettres en butte au virus », se compose de quatre chapitres donnant à lire les missives échangées entre des correspondants frappés de plein fouet par le coronavirus et la guerre. Dans la représentation de leur mal être, la forme épistolaire qu’ils adoptent combine quelquefois prose et vers libre dans ce que Foşalău appelle « lettre-poème » (p. 102). Le chapitre liminaire, « D’un projet à l’autre, le témoignage dans le témoignage », affiche la correspondance entre le poète Armel Jovensel Ngamaleu et l’universitaire japonaise Asako Muraishi. Le second chapitre, « Sororité et destin tragique », rassemble les missives de Maria Zaki et Khadija, deux sœurs marocaines basées l’une dans le département du Doubs en France et l’autre médecin résidant à Rabat. C’est l’Algérienne Aïcha Bouabaci et l’Espagnole Évelyne qui s’écrivent dans le troisième chapitre, « Algérie-Espagne en correspondance ». « Le [même] climat d’angoisse et d’incertitude [y]chasse la sérénité » (p. 46). Les échanges épistolaires de Liliana Cora Fosalău et Armel Jovensel Ngamaleu meublent le quatrième chapitre. Sous le titre « Deux poètes correspondent », ce chapitre s’illustre comme « une litanie de malheurs » (p. 96).
La deuxième partie de l’ouvrage, « Chroniques hybrides du temps pandémique », se déploie sous la forme du journal intime. Elle s’orchestre autour de cinq chapitres dont les auteurs notent au quotidien les événements qui les marquent et/ou les sentiments qui les révulsent. Ainsi, on constate le vide d’une vie en mode disjonction dans le premier chapitre signé de Simona Constantinovici : « L’attente. Petits points de vue » (p.107). « Confinée avec Jules Verne » constitue le deuxième chapitre ; Catherine Pitat s’y inscrit en faux contre la surconsommation que le confinement ravive (p. 112) pour davantage polluer la terre. C’est l’Algérienne Aïcha Bouabaci qui produit le troisième chapitre de cette deuxième partie, « La crise sanitaire en Algérie, mon pays : journal-chronique des grands premiers émois » (p. 115). La chroniqueuse fait un zoom sur les morts en masses de la Covid-19 dans sa patrie. La Camerounaise Emmanuelle Roxanne Makembe signe « Sûrement jamais : amour et pandémie » (p. 133), quatrième chapitre qui relate un amour à la fois entravé et favorisé par la Covid. Nous devons le cinquième et dernier texte de la deuxième partie à Jean-Nicolas De Surmont qui nous fait lire « Piplette, Gazette, les guerres imaginaires et la crise sanitaire en région rurale ». Sa contribution met en exergue les tensions qui sous-tendent les rapports humains dans le milieu rural où les ragots et les lieux communs amplifient la suspicion et nourrissent l’hostilité.